- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
La statue, en fer et béton, sur la Place de Saïo, est l’œuvre de l’artiste boyomais Henri Soku-Liandja, opérant pour le compte de la Coopération belge.
Il faut se souvenir que la Belgique a été le seul pays à avoir ouvert un bureau d’attaché de la coopération, détaché de son ambassade à Kinshasa, sous le régime rebelle du Rassemblement congolais pour la Démocratie. Comme il s’y pressait chaque jour une vingtaine de visiteurs, le plus souvent en quête de coopération, il apparut rapidement que l’espace était trop réduit et trop encombrant pour le service des missions catholiques. Ce bureau fonctionnait en effet à ses débuts en 2001 dans l’enceinte de la Procure. Dès 2002, l’accord fut acquis de restaurer les anciens bureaux de l’Agence maritime internationale (ex-AMIZA), ayant pignon sur la place de Saïo, et surtout d’obtenir du Gouvernement de Goma l’autorisation de fonctionner plus officiellement.
De plus, la partie centrale du complexe fut équipée en mobilier pour servir de lieu de rencontre dont la ville était dépourvue depuis le pillage du Centre culturel français. Dans le complexe rénové, plusieurs ministres belges rencontrèrent journalistes et membres de la société civile aux fins de concertation dans le cadre de la réconciliation des rebelles avec le pouvoir central. C’est dans la grande salle du complexe, anciens guichets de la Compagnie maritime belge, par exemple que la Défense belge organisa la formation des officiers congolais appelés à encadrer le premier bataillon intégré, en 2003-04.
En concertation avec la société civile, il fut décidé de marquer l’ouverture de cet espace réservé à la culture par l’érection d’un monument, dans le but avoué de redonner à la ville un signe de renaissance. La Coopération belge pris en charge les frais de création et d’exécution (par les soins de l’artiste lui-même) de l’oeuvre, à charge d’une micro-intervention en appui à la culture.
Mise en place de la protection contre l'assèchement par le soleil et le vent.
Construction de la structure interne et sculpture de la partie inférieure.
L’artiste s’exprime comme suit sur son œuvre : « La femme africaine, c’est la ville de Kisangani, fatiguée, désolée, abattue par les récentes guerres, qui vient puiser l’eau qui est la vie, qui fortifie et qui redonne le courage de continuer ; la source, c’est la Coopération belge qui donne de l’eau (formations, fonds, informations…) pour que Kisangani reprenne le chemin du progrès. »
Ce modeste monument, flanqué des drapeaux congolais et belge, fut le premier à relancer l’embellissement de la ville, encore fortement meurtrie par les trois guerres récentes et n’ayant reçu jusque-là que quelques coups de pinceaux de la part d’un opérateur téléphonique (CELTEL). Pour la petite histoire de la téléphonie, près de mille cellulaires furent vendus à l’arraché dans les jours qui suivirent l’ouverture du magasin de ce premier opérateur à s’implanter dans la ville, tant la soif de communiquer avec l’extérieur était grande chez les Boyomais.
Pendant des mois, la place de Saïo ayant retrouvé un certain lustre, par son imposant bureau de la coopération belgo-congolaise et par sa statue, fut le lieu de rendez-vous des jeunes venus prendre la pose devant le monument de Soku. Thierry Michel, en séjour à Kisangani pour les travaux préparatoires au documentaire qui aura pour nom "Congo River" ne manqua pas de filmer le phénomène.
Bel exemple d’un apport de la coopération à la renaissance d’une ville par l’effet de l’art.
Tableau du même artiste Soku, avec la statue face au Bureau de liaison de la Coopération belge à Kisangani (2003).
La Boyomaise à la cruche regardant en direction du fleuve, avec la cathédrale qui pointe le sommet de ses tours à travers les frondaisons.
Il fut demandé à l’artiste pourquoi le personnage est de biais par rapport au bâtiment qu’il décore. Le réponse fut qu’elle doit regarder le fleuve, source de vie, et non les passants.
Affluence ordinaire pour prendre la pose devant la statue. A la gauche de madame, son mari qui sera maire de Kisangani durant quelques années (fin 2003).
Instantané d’un des nombreux pelotons intégrés, conduits par leurs instructeurs belges, passant devant le bureau et sa statue, faisant route de la rive gauche où se fit leur rassemblement vers le site d’entraînement sis au-delà de l’ancien aéroport (début 2004).
Texte et photos de Fernand Hessel.
Retour vers Place de Saïo
Retour vers Liste des rues